Encore encore et encore, je n’en pouvais plus… Je l’aimais, mais à quel point, là maintenant, tout de suite je n’aurais su le dire… Il avait été le seul à me supporter, à me regarder puis avec le temps à m’aimer. Peter… Il était tout pour moi, ou du moins il avait tout été. Et maintenant me permettrait-il de me relever ? Je n’en étais absolument pas sur, mais je n’avais plus le droit de replonger. La dispute que nous venions d’avoir m’a complètement retourné, chamboulé, perdue… Comment pouvait-il dire ne serait ce que penser de telles atrocités !!? Je supportais de moins en moins nos disputes, elles me semblaient dévastatrices, et ce de plus en plus… Comment cela pouvait-il être gérable ? Depuis que mes traits avaient repris une forme humaine, une réelle beauté même si je puis dire, Peter était devenu inquiet, étouffant presque paranoïaque même, mais au point de souhaiter que je redevienne l’immondice que j’étais, c’était là de la pure folie !! Nous ne nous comprenions plus vraiment, et j’avais peur que peu à peu sa haine envers moi reprenne le dessus, et que disparaisse tout sentiment d’amour qui pointerait son nez. J’avais peur de cela oui. Mais une partie de moi tout au fond de mon âme semblait s’agitait à cette pensée, elle semblait heureuse, comme si on lui offrait une liberté nouvelle. Je ne la comprenais pas, que faisait-elle là, je ne ressentais absolument pas cela, j’aimais Peter, du moins je pensais l’aimer. Mais il ne pouvait pas continuer à m’étouffer de la sorte, il allait falloir trouver une solution ou je devrais bientôt me sortir de cette relation qui peu à peu me détruisait de l’intérieur !

Dans mes pensées, j’avais laissé mes pas me guider, et rêveuse j’avais erré telle une âme en peine dans les rues de Salvation. Je ne connaissais pas particulièrement bien ce quartier, mais étrangement il me semblait que je savais où j’allais… J’avais cet étrange sentiment depuis quelques semaines maintenant, j’oubliais des parties de mes journées ou de mes nuits, certains endroits où je n’avais jamais mis les pieds me paraissaient familiers, des personnes que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam me faisaient de grand sourire ou des clins d’œil, d’ailleurs la plupart de ces personnes étaient des hommes, chose à laquelle j’étais habitué mais pas à ce point-là ! Quelque chose changeait en elle, elle le sentait, mais elle n’aurait su dire à quoi cela se reportait.

Relevant les yeux pour me sortir de mon habituelle rêverie, je remarquai un joli petit quartier résidentiel non loin de là et décidai donc de m’y diriger espérant retrouver mon chemin par la même occasion. Entre temps la nuit était tombée, j’étais partie en fin d’après-midi de chez Peter et mes divagations m’avaient entraîné jusqu’au début de soirée. Et voilà que maintenant le ciel commençait à se couvrir ! Oui, il s’agissait vraiment d’une journée complètement pourrie, il n’y avait pas de doute… Il ne manquait plus que je tombe sur un casse pied et ma journée serait définitivement faite ! Voyant le ciel disparaître de plus en plus rapidement sous les assauts des nuages, j’accélérai le pas bien décidé à ne pas subir le courroux de ces derniers. Alors que le brouillard commençait également à tomber, je distinguai non loin de là les premières habitations, oasis lumineuses dans cet environnement de plus en plus noir. Accélérant de plus en plus le pas, courant presque pour les atteindre, je ne vis pas arriver la silhouette masculine sur ma droite, et faillis tomber alors que celle-ci m’heurtait de pleins fouets.
Surprise par cette attaque brutale, je me retournai vers l’individu en criant

Orphée : « Non, mais ça va pas non ! Vous pourriez regarder un minimum devant vous ! Et après, la société ose parler de gentleman ! »

Levant les yeux au ciel, je regardai mon interlocuteur hargneusement, il ne semblait même pas vouloir s’excuser ce malotru, non mais vraiment les gens n’avaient réellement plus aucun respect pour personne ! Alors que je lui jetai un dernier regard venimeux avant de tourner les talons, je le vis m’observer avec un très grande intensité, des dizaines d’émotions semblait se bousculer dans ces yeux. Cela aurait pu passer inaperçu s’il n’était pas entrain d’avancer vers moi avec ce regard affamé et vengeur. Décidant fermement de ne pas lui prêter attention, je me détournai de lui reprenant la direction de ma destination initiale. Mais alors que j’atteignais la première petite ruelle une main m’agrippa violement le bras, me plaquant sans vergogne contre le mur le plus proche. Apeuré par cette brusque attaque je tentai vainement de me dégager de l’emprise de mon agresseur avant de remarquer qu’il s’agissait du même homme qui m’avait bousculé quelques instants plus tôt dans l’avenue. Stoppant nette ma vive, mais inefficace, volonté de me défaire de sa poigne, je le regardai droit dans les yeux et reprenant la parole je lui crachai au visage :

Orphée : « Vous êtes vraiment dépourvu du moindre sens de civilité à ce que je vois ! Alors voyez vous quand on souhaite interpeller une personne ou l’arrêter, on tente de l’appeler avant de se jeter sur elle comme un sauvage ! Maintenant lâche moi ! »

Souhaitant avoir le plus de crédibilité possible, je ne baissai pas le regard et le tint fermement planté dans le sien. Mais alors que ma volonté était au plus haut de sa forme ces maudites impressions me revinrent en masse ! J’avais déjà-vu cet homme, je le connaissais, je le connaissais même très bien, mais d’où, j’aurais été dans l’incapacité de le dire… Apparemment je ne lui étais pas inconnu non plus, et mes intuitions se confirmèrent lorsqu’il lança farouchement

Démétri : « Tu vas voir si je ne suis pas assez bien pour toi !! Tu es prête à être plus que satisfaite, j’espère, car après ça tu ne pourras plus jamais dire que je ne suis pas bon amant ! »

D’abord stupéfaite par son langage assuré et familier, je mis quelques minutes à comprendre réellement le sens de ses propos. Cet homme était complètement fou ! Qui pourrait croire une chose pareille, il avait fallu que j’ose penser que je puisse tomber sur un tordu, pour qu’évidemment je tombe sur un tordu. C’était du grand n’importe quoi ! Je n’avais qu’une envie c’était de riposter sèchement à ces insinuations, mais plusieurs états complètement contradictoires balançaient en moi. Oui pour avoir peur, j’étais même effrayé, mais je ne voulais surtout pas le montrer, dans ce genre de situation, il vaut mieux cacher la moindre de ses failles et paraître forte en toute circonstance et ce même si vous avez envie de hurler, de crier à vous en déchirer les poumons. Et paradoxalement, je n’avais qu’une envie, lui envoyer une jolie petite droite dans sa jolie petite tête de façon à lui remettre les idées en place. Mais là encore suivant la réaction de celui-ci je n’aurais sûrement pas étais de taille à l’affronter. Et puis il y avait toujours cette étrange partie de moi qui ne souhaitais qu’une seule chose de jeter sur lui et n’en faire qu’une bouchée, mais je refoulai cette partie là bien vite avant qu’elle ne puisse prendre le dessus, car je le savais, elle en était tout a fait capable !... Reprenant alors rapidement mes esprits, je me souviens de ces deux, trois dernières fois où lorsque j’avais regardé certaines personnes intensément elles étaient devenue plus douce, plus compréhensive, meilleure en somme le temps d’un instant. Tentant tant bien que mal, de lutter contre les assauts du jeune homme, j’escomptai par la même occasion, saisir ne serait ce qu’un instant son regard de façon à pouvoir… Pouvoir faire quoi d’ailleurs, je n’avais strictement pas la moindre idée de e que je devais faire pour adoucir ce sagouin et parvenir par la même occasion à le fuir. Mais alors que je désespérai de capter son regard, celui-ci me jeta un rapide coup d’œil dont je m’empressai de me saisir. Une fois que je le tins, j’assaillis celui-ci de douceur, avec une volonté quasi implacable. Ne sachant pas vraiment quoi faire, je laissai mon instinct prendre le dessus, sachant que là où j’étais une novice, mon corps était un expert. Et alors que je ne lâchais pas son regard, je sentis petit à petit ses mains relâcher la pression et son regard s’attendrir. Et alors qu’il me semblait que j’avais presque terminé « la chose » je sentis une puissance grandir en moi, quelque que chose d’incontrôlable, quelque chose qui allait complètement m’envahir si je ne l’arrêtais pas immédiatement ! Comprenant que cette force grandissait avec l’utilisation que je faisais du pouvoir, je relâchais le regard du jeune homme sur le champ. Cependant je ne m’attardai pas, sachant que les répercutions du pouvoir ne dureraient pas éternellement, je m’empressais de quitter l’étreinte de l’inconnu et courir vers la maison la plus proche pour m’y réfugier. Sans réellement savoir pourquoi, je sus une fois le pallier franchis je j’étais à l’abri.